Sans e-liquides aromatisés, le tabagisme explose

Le 1er janvier 2019, San Francisco avait interdit la vente des e-liquides aromatisés, à l’exception des goûts tabac. Prétexte avancé ? La protection des jeunes contre le supposé effet passerelle. Mais avec le recul, cette mesure semble totalement contre-productive. Selon une étude récente, la part des fumeurs de 18 à 24 ans aurait augmenté de plus de 30 % depuis la prohibition des arômes.

Sans e-liquides aromatisés, le tabagisme explose

Les preuves continuent de s’accumuler sur l’absence d’effet passerelle chez les jeunes, entre vapotage et cigarettes combustibles. Mais aussi sur le risque sanitaire que fait peser l’interdiction des e-liquides aromatisés. Dirigée par le professeur Yong Yang (photo), de l’Université de Memphis, une étude publiée en juin dernier sur Addictive Behavior Reports s’intéresse aux conséquences de l’interdiction à la vente de ces e-liquides à San Francisco

Entrée en vigueur le 1er janvier 2019, cette prohibition aurait ainsi eu des effets contraires à ceux escomptés, selon l’étude. Reposant sur deux sessions d’entretien, conduites en décembre 2018 (soit avant l’interdiction) puis en décembre 2019, l’enquête montre que la part des fumeurs a augmenté de 35 % chez les jeunes de 18 à 24 ans, au cours de la période. En parallèle, le nombre de vapoteurs s’est réduit de près de 20 %. Convertis en taux global et rapportés à l’ensemble des groupes étudiés, de 18 à 35 ans, ces résultats montrent un vrai effet de vase communiquant : un jeune sur dix s’est mis à la cigarette, tandis qu’un sur dix a abandonné la vape.

Jusqu’à 30,9 % de report vers la cigarette combustible

L’étude se montre plus précise selon le type d’usage. Ainsi, chez les vapoteurs exclusifs, 60,3 % des personnes interrogées ont continué comme auparavant, 20,7 % ont arrêté sans report et 19 % sont passés à un produit de tabac. Chez les vapo-fumeurs, le passage vers le tabagisme exclusif est encore plus inquiétant : 65,4 % ont continué, 30,9 % sont passés à un produit de tabac et 3,7 % ont arrêté toute consommation. 

Des résultats qui confirment l’étude sur l’impact des e-liquides aromatisés, menée par deux chercheuses de l’Université de Yale. « L’interdiction des e-liquides aromatisés pourrait augmenter le tabagisme, concluaient-elles, les saveurs aromatisées n’étant pas davantage associées avec le démarrage du tabagisme chez les jeunes que les goûts tabac, alors qu’elles sont plus efficaces dans l’arrêt à l’âge adulte. » 

De graves conséquences sanitaires à prévoir, si la législation européenne se durcit

Leur étude suggère notamment que les e-liquides aromatisés seraient jusqu’à 2,3 fois plus efficaces pour arrêter la cigarette que les e-liquides au goût tabac. Pourtant, dans certains Etats européens, les pouvoirs publics semblent persister dans leur intention de les bannir, et ce au nom de la protection des jeunes. Or une telle position pourrait avoir des conséquences sanitaires désastreuses alors que se dessine un réexamen de la TPD.

Pour rappel, depuis le 1er juillet, l’Allemagne a hérité de la présidence du Conseil de l’Union européenne jusqu’à la fin de l’année. Et Daniela Ludwig, la commissaire fédérale aux drogues outre-Rhin, y voit « l’opportunité de réglementer davantage les cigarettes électroniques […] Les saveurs fruitées dans les liquides plaisent aux jeunes, mais elles ne sont pas du tout faites pour les fumeurs ». Même tendance, et même amalgame du côté des Pays-Bas. Dans le cadre de son projet de « génération sans tabac », le secrétaire d’État au ministère de la Santé Paul Blokhuis propose une interdiction totale des e-liquides aromatisés à partir du printemps 2021. 

L’étude dirigée par le professeur Yong Yang souligne un autre effet délétère de l’interdiction des e-liquides aromatisés. Les boutiques spécialisées de San Francisco sont victimes d’une franche désaffection. Pour preuve, une baisse de fréquentation de près de 43 % ! Autre conséquence : l’émergence, non quantifiée mais palpable, d’un marché noir sur toute la côte Est des États-Unis. Quand on sait qu’il est à l’origine de l’épidémie des maladies pulmonaires, survenue l’été dernier, par la prolifération de produits frelatés et incontrôlés, les risques sanitaires d’une telle prohibition pourraient bien être dramatiques à très grande échelle.

Source : Vapolitique