L’espoir d’une santé sans tabac

Nicolas Bonnet, directeur général du RESPADD, revient sur le rôle central de son organisation dans la lutte contre le tabagisme et partage son analyse sur la place de la cigarette électronique comme outil de réduction des risques. Dans un contexte de réglementations parfois contestées, il plaide pour une approche fondée sur des données scientifiques et défend la vape comme alliée dans le sevrage tabagique.

L’espoir d’une santé sans tabac

Depuis plus de deux décennies, le Réseau de prévention des addictions (RESPADD) œuvre à fédérer et accompagner les établissements de santé dans leur lutte contre les pratiques addictives. Nicolas Bonnet, pharmacien de santé publique et directeur général de l’association, rappelle que le RESPADD est aujourd’hui la plus grande organisation en Europe dédiée à cette mission, regroupant plus de 600 établissements tels que des hôpitaux, des cliniques et des EHPAD.

Créé en 1996, initialement sous le nom de Réseau Hôpital Sans Tabac, le RESPADD est né d’une volonté de promouvoir des politiques de santé publique dans le sillage de la loi Evin de 1991. « Notre mission originelle était de sensibiliser et de prévenir le tabagisme au sein des établissements de santé, pour les personnels comme pour les patients », précise Nicolas Bonnet. Au fil des ans, cette mission s’est élargie pour inclure l’ensemble des pratiques addictives, tout en conservant un ADN axé sur la science et l’accompagnement des professionnels de santé.

 

La cigarette électronique : un outil d’avenir

La lutte contre le tabagisme reste un pilier essentiel des actions menées par le RESPADD. Face aux défis posés par l’addiction au tabac, Nicolas Bonnet voit dans la cigarette électronique un outil précieux, mais encore sous-utilisé. Il cite notamment la revue Cochrane, référence internationale dans l’évaluation des pratiques médicales, qui confirme l’efficacité de la vape dans le sevrage tabagique.

« La cigarette électronique, avant tout, est un moyen d’aide à l’arrêt du tabac », affirme-t-il. Selon lui, son principal avantage réside dans sa capacité à renforcer la motivation des fumeurs : « Les bénéfices se remarquent très rapidement, que ce soit sur la respiration, le goût ou l’odorat, ce qui encourage les usagers à poursuivre leur démarche. » Cependant, il met en garde contre un usage prolongé de la vape qui risquerait de devenir une addiction de substitution : « Il faut toujours viser une transition complète, pour ne pas simplement remplacer un produit par un autre. »

Des politiques publiques en décalage avec les enjeux de santé

Interrogé sur les récentes réglementations entourant la vape, comme l’interdiction des puffs ou l’instauration de nouvelles taxes, Nicolas Bonnet se montre critique. « Ces décisions relèvent d’une approche populiste plus que d’une véritable réflexion de santé publique. Elles répondent à des faits divers isolés, mais n’ont pas un réel impact sur les comportements de consommation. »

Il souligne que la réglementation française, largement alignée sur les directives européennes, a jusqu’ici su garantir la qualité et la traçabilité des produits de la vape. « L’offre reste accessible et encadrée, mais la taxation croissante pourrait devenir un frein », avertit-il. Il fustige également les discours associant la cigarette électronique à une porte d’entrée vers le tabagisme : « Les données montrent exactement le contraire. La vape est un outil qui détourne les jeunes du tabac. »

 

Le RESPADD, acteur scientifique et militant

Au sein du RESPADD, la valorisation de la cigarette électronique passe par une communication rigoureuse et une sensibilisation des professionnels de santé. « Nous mettons en avant la vape comme une stratégie d’accompagnement dans le sevrage tabagique », explique Nicolas Bonnet. Toutefois, il reconnaît que son intégration dans les politiques publiques reste limitée : « Certaines grandes avancées ont été freinées ces dernières années par des réticences nationales. »

Pour lui, la cigarette électronique mérite une place plus centrale dans les stratégies de santé publique. Il écarte cependant l’idée d’un remboursement par la sécurité sociale : « La vape est un produit de grande consommation. La catégoriser comme médicament entraînerait des restrictions d’accès et serait contre-productive. »

Des obstacles multiples à surmonter

Malgré des preuves scientifiques en faveur de la vape, de nombreux freins subsistent. Nicolas Bonnet évoque notamment l’influence des lobbys du tabac, désireux de protéger leur monopole sur le marché de la nicotine, et les inquiétudes populaires face à un dispositif encore perçu comme récent. « Même si elle est moins toxique que le tabac, des questions légitimes se posent, et il faudra du temps pour les dissiper avec des données fiables. »

L’usage récréatif de la nicotine complique également le message porté par la vape. Toutefois, Nicolas Bonnet reste confiant dans la capacité des acteurs communautaires et associatifs à faire évoluer les mentalités : « Notre mission est d’amener des preuves scientifiques solides, pour dépasser les craintes et bâtir, si nécessaire, des limites encadrées. »

 

Une vision optimiste pour l’avenir

Pour Nicolas Bonnet, la vape reste un atout majeur dans une société qui aspire à une santé sans tabac. Il en appelle à une mobilisation collective pour défendre cet outil auprès des décideurs publics : « La roue tournera, j’en suis persuadé, mais cela demandera de la persévérance et un engagement commun. »

En attendant, le RESPADD poursuit son travail de sensibilisation, avec une conviction intacte : la réduction des risques est la clé d’une lutte efficace contre les addictions.